Le quartier de Suq Saruga, comme on l'appelle aujourd'hui, ou Suwayqat Saruga, tel qu'on l'attribue à son fondateur l'émir Sarim al-din Saruga al-Muzaffari (m. 743/1343) se situe au nord-ouest de la ville intra-muros. Le nom de suwayqa signifie marché non spécialisé lié aux quartiers résidentiels. Suwayqat Saruga en constitue un exemple type.
Le quartier en question, dont l'histoire est mal connue, est aujourd'hui partiellement détruit et pratiquement menacé de disparition; c'était un site de résidence de notables et de personnalités proches du pouvoir durant plus de cinq siècles. L'importance historique et architecturale de ce quartier, et le danger qui le menace nous ont conduit à effectuer cette étude, qui exige deux types de recherches : le premier, sur le terrain, où nous faisons des relevés architecturaux et des dessins des maisons et des monuments; le deuxième concerne la documentation d'après les sources historiques, les registres des tribunaux en particulier.
A. Moaz. Damas, le quartier de Saruga à Damas :Maison No 239, Mausolée No 240, Maison No 240, Maison No 242, Maison No 244, Mosquée al-Ward No 273, Mausolée al-Tabrizi No 276, Maison No 277, Maison No 279, Maison No 307, Maison No 308, Maison No 309, Maison No 676, Maison No 678, Maison No 679, Maison No 693
Nous essayons de comprendre ce vieux quartier dans son ensemble, connaître les processus anciens de constitution de tissu urbain ancien et de ne pas nous contenter d'étudier seulement quelques monuments séparés.
Ce travail concerne également des problèmes particuliers comme la continuité et la rupture dans l'histoire du quartier, ainsi que la mixité de la population. Nous expliquons également les raisons du succès de ce quartier pendant cinq siècles.
Cette étude concerne aussi l'habitat de Damas à l'époque ottomane, mal connu et peu publié. Ces maisons étudiées, bien qu'elles soient souvent d'une période tardive, présentent un grand intérêt architectural et historique.
Mon équipe et moi avons terminé le travail de terrain concernant le relevé architectural de 70 maisons et édifices grâce à une subvention de la Fondation Max van Berchem. Il faut indiquer que les travaux de destruction dans le quartier ne se sont pas arrêtés pendant la réalisation du projet. Les relevés que nous avons effectués et étudiés appartiennent à deux catégories :
1. Des édifices religieux comme la grande mosquée al-Ward et le mausolée d'al-Tabrizi (XVe siècle) (monuments importants et non relevés), la mosquée et le mausolée d'al-Muradi (fin XVIIe siècle).
A. Moaz. Damas, maison al-Abid : porte de la qa'a
2. Des maisons traditionnelles : les quelques palais et grandes demeures qui s'y trouvent ont fait l'objet d'un relevé par des services de l'Etat ou par des étudiants de la faculté d'architecture sauf la maison al-'Abid (2400 m2) que nous avons relevée ainsi que de nombreuses maisons "bourgeoises" comportant des pièces de réception richement décorées comme la maison No 678, détruite après le relevé.
Dans ce projet, nous avons donné un intérêt aux autres types de maisons, comme les maisons moyennes et les maisons modestes. Ces habitations qui donnent des informations sur la vie des classes moyennes et modestes, sont toujours les plus menacées de destruction. Ces maisons sont datées ou datables des XVIII-XIXe siècles. Elles ont fait l'objet d'une restauration tous les 20 ou 30 ans à cause de leurs matériaux de construction légers.
A. Moaz. Damas, maison Sabah-Hattab : façade nord
Le quartier de Suwayqat Saruga, était un quartier "chic" par excellence comme l'indique les caractères de ces habitations. A l'époque ottomane, ce quartier se distingue par ses habitants d'origine "étrangère" en grande partie, et par l'existence d'une grande communauté turque. Ces habitants se regroupaient ensemble dans ce petit Istanbul, loin de l'agitation de la ville intra-muros.